Quelques textes

Il est rassurant de penser qu’il peut encore exister une peinture saine, naturelle, sans faux problèmes. Une peinture instinctive, suffisamment sûre de ses moyens pour nous parler un langage direct : une peinture qui nous atteint sans que nous éprouvions le besoin de la situer ou de lui trouver une parenté.
Les tableaux de Philippe Charpentier s’imposent par eux-mêmes. Ils ont une respiration saine, ils sont musclés sans être agressifs, s’ouvrent au regard sans le solliciter, mais le retiennent tel un paysage familier qu’on découvre pour la première fois. Ils nous invitent, comme la nature, à nous laisser envahir.
De grandes plages de couleurs franches mais sensibles accompagnent des éléments aussi réels que les villes ou les champs, même presque plus réels car ils ne doivent leur existence qu’aux seuls rapports de tons, animés par une volonté bien affirmée, si bien qu’on ne voudrait les considérer qu’en eux-mêmes.
Forces de la nature, mais d’une nature forte, ces œuvres parlent un langage sans artifice, fondé sur les propriétés intrinsèques à leur matière picturale.
Où va la peinture de Philippe Charpentier ? Elle ne prendra pas de chemins tortueux. Chaque tableau s’enrichit, se fraye de nouvelles ouvertures, découvre d’autres formes, ne s’appuyant que sur lui-même.
Je suis sûr que sa démarche saine restera celle de la vraie peinture, nourrie par l’instinct et par une vision se creusant au plus profond de sa nature propre.

Henri Goetz,  1er février 1981


Tumulte et passion
La peinture avec tumulte et passion. Tumulte des couleurs et des gestes qui se heurtent et s’affrontent. Passion des couleurs et des gestes qui se recouvrent et s’exaspèrent. Ils se choquent comme des corps prisonniers de leurs désirs et de leurs refus ; ils se déchirent comme les draps tâchés qui enveloppent ces corps.
Tumulte des couleurs qui coulent comme le sang et le sperme des corps évadés de leurs désirs, comme la transpiration des corps évadés de leurs refus. Ils tâchent et brûlent les draps.
Tumulte des gestes qui perdent tout contrôle et qui lacèrent les draps. Mélange de photographies et de feuilles de journaux reflets de vies et fragments de désirs. Les toiles sont prises comme des corps avec violence. Passion de la couleur comme rage de crier son besoin de quelque chose, de hurler son désir de quelqu’un.
Passion du geste qui déchire et détruit ces fragments de corps, ces reflets d’espérance.
Force du geste et de la couleur. Contrôle du geste : le rythme est donné. Maîtrise de la couleur : la plénitude est offerte. La peinture est là comme acte d’Amour.

Jean-François MOZZICONACCI
Sitia, Crête, 24 juin 1988

 

Lorsque la peinture de Philippe CHARPENTIER se projette dans notre espace et nous pénètre, on ne s’étonne pas d’apprendre que cet artiste a été un temps batteur dans un groupe de jazz. Il est un homme du ressenti et de l’instant, dont la seule ligne de conduite est certainement d'être surpris perpétuellement.S’abandonnant au geste créatif avec intensité, l'artiste expérimente la couleur, la délie, l’exalte. Froissant les formes, les essuyant, il nous livre une œuvre foisonnante d’énergie qui compose sans cesse avec le hasard. Ne vous laissez pas berner par l'apparente spontanéité de son travail : l’improvisation est un acte technique chargé d’intention. Philippe CHARPENTIER vous dirait certainement, reprenant les mots de Jean Auguste Dominique Ingres, que «  le dessin est la probité de l’art ». Il se fait l’intime arrangeur d’une matière qui s’exprime sans artifice et qui, à chaque coulure, trace son architecture émotionnelle.

Et lorsque l'artiste s’empare du thème du printemps, la toile devient le refuge rythmique d’un ensevelissement d’empreintes diaphanes, explosion d’une nuée polyphonique de couleurs. Tel un voyage en mer corallienne aux faux airs de ballets Russes, Philippe CHARPENTIER génère ici d’indicibles accords harmoniques qui sauront sans aucun doute toucher la corde sensible de chacun.

Audrey MATON

L’explosion et le tumulte des couleurs reflètent le foisonnement de la vie dans les peintures de Charpentier. Très coloriste, mais pas dénuée de formes, cette peinture est un feu d’artifice permanent, tantôt dans des couleurs chaudes, tantôt dans des bleus et verts, ou dans un mélange des deux.  Loin de l’opposition du figuratif et de l’abstrait, elle ne se laisse enfermer dans aucune formule, dans la grande variété des acryliques sur toile, des gouaches, des pastels ou des aquarelles.  A cela se joint l’enchantement des titres des tableaux qui nous font voyager parfois au plus près des volcans.
L’œil du peintre pétille et cela se retrouve dans la richesse des couleurs et des formes, dans le flamboiement ou l’efflorescence de figures esquissées et colorées. Les formes sont prises dans des couleurs au lieu que les couleurs remplissent simplement les formes. La palette est souvent incandescente,  évoquant les fauves. La composition se fait discrète, mais elle est là, dans des toiles à la limite du figuratif.
La peinture de Charpentier est un concentré d’histoire de la peinture et de tendances picturales. Elle est aussi énergie pure et création vive.

                                                                             Christiane Chauviré     Philosophe

Textes de présentation Anglais /Allemand

Allemand
Geboren am 3. März 1949 in Paris.

In den 70iger Jahren, beginnt Philippe Charpentier, ein vielversprechender Jazzmusiker - parallel zur Musik -zu malen. Ab  Anfang der 80iger Jahre wird die pikturale Kunst seine ausschliessliche Ausdrucksform. Seitdem hat der Künstler unzählige Einzelausstellungen veranstaltet und an zahlreichen Gruppenausstellungen in der ganzen Welt mit Erfolg teilgenommen. Seine Werke sind in zahlreichen öffentlichen und privaten Kollektionen vertreten. Sein nicht abstreitbarer Erfolg führte auch zu Ankäufen seiner Werke durch Museen, Firmen und Privatmäzenen. Er war auf allen grossen Kunstmessen durch seine Galerien vertreten.

Es ist schwer die Kunst Charpentiers einzuordnen. Sie ist seit 30 Jahren in einem unaufhörlichen Werdegang begriffen. Sie ist instinktiv, dabei ihrer Ausdrucksmittel so sicher, dass seine Kunst uns direkt anspricht. Der Beobachter ist nicht genötigt nach Wahlverwandtschaften, Referenzen oder Einflüssen zu suchen. Die Gemälde von Philippe Charpentier sprechen für sich selbst. Ihre Dynamik beruht auf einer aussergewöhnlichen Beherrschung der Farbgebung und Gestik. Sie ist gesund und direkt, ohne falsche Probleme. Es gibt ungeheuere Kraft - ohne Brutalität, unbegrenzte Sensibilität und eine gesunde Sinnlichkeit. Der chromatische Aufbau seiner Werke ist oft gewagt aber immer sicher.

Philippe Charpentier macht nicht Kunst, er ist.

 

Anglais
Philippe Charpentier begins to paint in the 70ties parallel to being a promising jazz musician. As of the beginning of the 80ties he entirely devotes himself to painting. Since then the artist has shown his work in numerous one man exhibitions. He also participated successfully in many group shows on an international level. His work is represented in collections both public and private. The obvious success encountered by his work led to purchases by museums, private and corporate sponsors. Galeries showed his work on all important art fairs.

It is very difficult to classify the art of Charpentier. Over the last 30 years his work has been in constant evolution. His expression seems to be instinctive based on a great mastery of both gesture and colour. The result adresses the spectator directly. No need to search for references or influences. The paintings of Philippe Charpentier speak for themselves. The dynamic of the work is an incredible colour sense and sureness of gesture. Everything is straight - there are no false problems. There is immence force but no brutality. Almost unlimited sensibility as well as a good deal of sensuality. The sometimes chromatically daring composition of his work is proof of the artists proficiency.

Philippe Charpentier doesn't paint to make art, he is a painter.
C.L.P

 

 

Brigitte Rivoire

PHILIPPE CHARPENTIER

La Peinture en éruption

Une explosion de couleurs

 

Fatalement, nous sommes des voyeurs impudiques et brusques.

Ecrire, parler d’un artiste, c’est aussi le juger. Difficile exercice.

Philippe Charpentier ne se répand pas sur son « travail ». Il n’est pas un
homme de confidence. Son Verbe, c’est le Trait. Au commencement est le Trait.

Et les Couleurs.

De La Vie.

 La Sienne. Il la recrée du bout de ses mains, la laisse couler de ses pinceaux et
des « outils » qu’il utilise pour nous la livrer.

Voilà un bail que ce volcan, fait homme, peint. Un volcan marin avec
l’apparente et trompeuse timidité d’une violette. D’une anémone de mer. Ou les
deux.

La critique d’Art est pleine de préjugés et, disons-le tout net, s’est souvent
plantée tout au long des siècles. Nombre de critiques d’art déclarés, patentés par le
pouvoir du moment, se sont allègrement, voire méchamment fourvoyés, nuisant à
des carrières prometteuses voire installées et portant au pinacle des barbouilleurs
sans aucun talent.

Rien n’a changé à ce sujet, je ne vous le fais pas dire.

Charpentier, comme son nom ne l’indique pas (sourires) fait partie des
bâtisseurs confirmés. Libre à vous de parcourir sa biographie.

Puisque le peintre ne se livre pas, il suffit de découvrir son atelier pour
commencer à entrevoir le personnage. Ordre et méthode y règnent. Son atelier ?
Une pièce quadrangulaire, une matrice, une caverne de couleurs. Trois murs sont
encombrés de toiles, travaillées en même temps. Le quatrième est son écran
personnel. Sur lui, Philippe accroche, voire agrafe à même hauteur, ses toiles et ses
papiers.

C’est un privilège de le voir travailler mais c’est également un moment
étonnant. L’homme est impressionnant de puissance, de précision et de rapidité

 

d’exécution. C’est un musicien, un batteur qui scande les notes sur ses toiles, ses
pinceaux battent la mesure au rythme de ce qu’il entend, au propre comme au
figuré. Du coup, ses peintures chantent avec lui, par lui. Il faut prendre le temps de
les décrypter et les écouter. Entrer dans l’univers pictural de Philippe Charpentier se
fait en musique dont la porte est une batterie et la serrure, une clef de sol.

Quand plus rien ne « sort » de lui, il recule, jauge et juge. Sans aucune
complaisance. Et arrête.

Lorsqu’on lui demande quand il sait que la toile est terminée, il vous répond
qu’il le « sent ». Il vous regarde avec ses gros yeux, couleur de lagune et c’est tout.
N’attendez pas d’explications supplémentaires. Vous n’en aurez pas.

Obligation est faite, en cette triste époque, d’étiqueter, de nommer, de
baptiser. Expressionniste triomphant me vient tout de suite sous la plume puisqu’il le
« faut » bien. Cet expressionnisme est contemporain. Cependant, cette peinture
nous parle, comme si elle ramenait, du tréfonds de notre conscience, une sensibilité
primitive inhérente à notre condition. Animale et humaine à la fois.

Evidemment, les fondamentaux, les quatre éléments, Eau, Air, Terre, Feu sont
omniprésents. Ajoutez à cela Voir, Goûtez, Entendez, Savourez, Touchez, Explorez.
Une chanson de Geste.

 Philippe a trouvé le système de dompter, d’apprivoiser l’énergie, cela même en
dépit de l’amplitude de sa peinture qui « sort » du cadre de la toile. Aucun de ses
tableaux, d’ailleurs n’est encadré. Pas de bordure. Il convient de laisser les couleurs
et les personnages s’échapper dans le réel.

Pour parodier Jean Cocteau (pardon !) à l’instar de l’écriture : Peindre est un
acte d’amour, s’il ne l’est pas, il n’est que de la peinture. Charpentier peint avec son
sang, c’est indéniable.

Je m’autorise à « Le » comparer au bassin de Gundestrup, le « graal » celte, un
chaudron magique, bouillonnant de couleurs et de personnages vivants. En sort une
potion tangible, le fluide vital que vous avez sous les yeux. Même les comètes fébriles
dans l’eau, nées de ce chaudron pictural provoquent une émotion physique.

Ses eaux dormantes ne le sont pas. Elles couvent, je ne sais quelle tempête
d’électrons qui ne demande qu’à exploser. Trompeuse tranquillité de « ses
marines », toujours l’étiquetage, qui masquent mal le tsunami à venir.

On devine les fissures, les blessures enfouies, on attend l’explosion.

 

Qui ne tarde guère.

Charpentier a besoin de la Nuit et de la profondeur. Alors, ses fractures mutent
en Feu. Galaxies, comètes et volcans s’apaisent par l’eau des abysses.

Charpentier peint en respirant, en rythme. Même processus que l’écriture, il se
livre et se délivre. Pour en jouir.

Charpentier est un sensuel et un expressionniste triomphant.

Il projette des tableaux dans Le Tableau sans aucune hiérarchie. Comme tous
les « grands ». La peinture est un Art Majeur.

Ce langage, cette écriture picturale ressemble à ces langues antiques, dont une
seule est encore pratiquée, l’hébreu ; chaque « hiéroglyphe », chaque lettre est à la
fois un mot et un concept dont le sens n’est pas dénué d’humour. Lesquels évoluent.
On reconnait « un » Charpentier, au premier coup d’oeil.

J’ai acheté une toile de Philippe, voilà plus de vingt ans. Tous les jours je trouve
un nouveau rébus dans mon Charpentier, quand je change d’endroit pour le regarder
et entrer dedans. Reconnaissez qu’il y a un brin de magie et de sorcellerie dans cette
histoire. Normal ? Certes, Philippe Charpentier vit dans le Berry, ponctué
d’échappées océanes. La nature est vitale pour lui, la forêt, les arbres, les fleurs et les
animaux libres qui peuplent « son » jardin.

La peinture de Charpentier est un Jardin.

Un Jardin de Couleurs, aussi vivantes que vous et moi.

Confrontée à ses oeuvres, sans le connaître, grâce à Gérard Capazza, qui a eu le
mérite et le génie d’exposer les meilleurs artistes contemporains, je n’ai eu de cesse
de le rencontrer, voilà trois décennies. Le voir travailler, en son atelier, fut et reste un
privilège. « Sa » peinture est un cadeau de la Vie.

Un vrai cadeau.

 

Philippe Charpentier.

La Peinture en éruption.

Mars 2023

Brigitte Rivoire.

 

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